Depuis les prémices de l’âge plastique dans la moitié du XXe siècle, l’espèce humaine a produit une quantité astronomique de plastique, atteignant le chiffre faramineux de 8,3 milliards de tonnes. Quant à la production annuelle, elle ne cesse de s’accroître, enregistrant 380 millions de tonnes supplémentaires par an. En dépit des initiatives de recyclage, seulement un maigre 9 % de ces déchets plastiques est réemployé, le reste, hélas, contaminant inexorablement nos écosystèmes.
La pollution plastique, ce fléau, s’est introduite dans tous les recoins de notre globe, des abysses océaniques jusqu’au sommet de l’Everest. Plus inquiétant encore, elle s’est infiltrée jusque dans les cellules des êtres humains et autres organismes vivants.
Les impacts à long terme de l’ingestion de plastique sur la santé humaine s’avèrent encore assez flous. Toutefois, des recherches menées sur des rongeurs ont révélé que la consommation de microplastiques pourrait engendrer des troubles au niveau du foie, des intestins, des organes exocrines et reproducteurs.
En évoquant les espèces les plus menacées par la consommation de plastique, on pense aux oiseaux nécrophages, spécifiquement les vautours originaires du Nouveau Monde. Ces créatures ont souvent pour lieu d’alimentation les décharges publiques et on les a observées à ingérer des matériaux synthétiques tels que des sièges nautiques, des joints caoutchoutés ou encore des toits.
Une étude innovante publiée dans la revue Frontières de l’écologie et de l’évolution a mis en lumière un lien entre la consommation de plastique chez les vautours noirs et à tête rouge (Coragyps atratus et Cathartes aura) et leur emplacement dans les zones suburbaines et exurbaines.
Selon ce même travail de recherche, la quantité de plastique ingérée par ces vautours n’est pas une simple affaire de contexte urbain ou rural. Elle est davantage influencée par la densité commerciale humaine au sein des paysages urbanisés.
Hannah Partridge, doctorante au Département de géographie et des sciences de la Terre de l’Université de Caroline du Nord à Charlotte et auteure principale de ladite étude, a dévoilé ces résultats étonnants : « Nous démontrons ici que les vautours noirs et à tête rouge dans les zones présentant un fort développement urbain et une grande densité de fournisseurs commerciaux de produits alimentaires ingère plus de plastique.
Partridge a également avancé une hypothèse audacieuse : « Il est probable qu’ils ingèrent une portion de ce plastique de manière délibérée, au lieu de simplement par accident, comme on le suppose généralement. »
Une consommation de plastique examinée à la loupe par le biais des pellets de vautour
Entre 2021 et 2022, Partridge et ses collaborateurs ont scruté huit sites de rassemblement de vautours noirs et à tête rouge dans la zone métropolitaine de Charlotte, région peuplée d’une population humaine croissante estimée à 2,8 millions. Ces sites accueillent en général entre 20 et 500 vautours. Dans le but de mieux saisir la consommation de plastique des vautours, l’équipe de chercheurs a récolté au total 1 087 boulettes de matière non assimilée, régurgitée par les oiseaux.
Après analyse, il s’est avéré que 60 % de ces granulés renfermaient du plastique, ce qui correspondait en moyenne à 2,7 % de la masse totale. En sus des résidus plastiques, les granulés comportaient aussi divers autres matériaux incluant de la végétation, de la terre, des pierres, des débris d’animaux, du métal, du textile, du papier, du bois et du verre.
Les chercheurs ont fait appel à la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR) pour distinguer les catégories précises de matières plastiques présentes dans les échantillons. Parmi les plastiques les plus couramment retrouvés, on compte le caoutchouc de silicone (7,5 % des échantillons examinés), le polyéthylène de haute densité (7,0 %), le polyéthylène (6,4 %) et le biopolyéthylène silicaté (5,3 %).
Afin d’approfondir l’étude du lien entre la consommation de plastique et le développement humain, les chercheurs ont mis en parallèle la quantité de plastique contenue dans les granulés avec quatre indicateurs du développement humain. Ces investigations se sont échelonnées sur une gamme grandissante de distances, s’étirant de 400 mètres jusqu’à 20 kilomètres en suivant une ligne droite à partir du perchoir du vautour.
Les paramètres étudiés regroupaient la densité des distributeurs commerciaux d’aliments (embrassant aussi bien les commerces de proximité et les food trucks que les hypermarchés et les restaurants), la concentration des éleveurs de bétail et de gibier, l’ampleur de l’urbanisation du sol, et la proximité de la décharge la plus proche.
Des supermarchés, des restaurants et des oiseaux inquisiteurs
Des méthodes d’analyses statistiques ont mis en lumière une forte dépendance entre la portion de la massse de granulés composée de plastique et l’accroissement de l’urbanisation, ainsi que la concentration des fournisseurs de denrées alimentaires dans un rayon de 20 kilomètres. Les experts ont conclu que les vautours noirs de la région métropolitaine de Charlotte, et plus particulièrement, pourraient en majorité ingérer du plastique provenant des bennes à ordures appartenant aux fournisseurs de denrées alimentaires.
La chercheuse Hannah Partridge a partagé ses observations en soulignant : « Les vautours noirs ont souvent tendance à se reposer la nuit sur un pylône près d’un fast-food et s’envolent directement vers la poubelle au lever du jour. »
À l’opposé, les vautours à tête rouge sont moins enclins à ce comportement, leur préférence se portant plus vers des zones rurales et des sources de nourriture naturelles.
Les chercheurs ont voulu discerner si les vautours ingèrent du plastique délibérément ou accidentellement. Ils ont suggéré que ces oiseaux pourraient couramment confondre les miettes de plastiques avec des fragments ossifiés potentiellement nutritifs, qui se rencontrent habituellement dans les charognes.
Partridge a remarqué : « Les vautours sont intrigués et sont continuellement à la recherche de nouvelles sources de nourriture, ils peuvent alors ingérer du plastique en pensant que c’est de la nourriture. Mais parfois, ils peuvent également ingérer du plastique volontairement, dans le but d’accumuler de la masse pour ainsi les aider à régurgiter des parties indigestes de charognes tels que les poils ».
Pour pallier le problème lié à l’ingestion de plastiques chez les vautours et autres animaux vulnérables, l’autrice principale de la recherche, la Dre Sara Gagné, enseignante chevronnée dans le même département, a avancé quelques suggestions. « Les distributeurs de produits alimentaires tels que les restaurants et les supermarchés peuvent garantir que leurs déchets soient correctement ensachés, que les ordures soient correctement convoyées vers la poubelle et que la poubelle soit bien close et sécurisée. Nous pouvons également nous orienter vers l’interdiction des plastiques à usage unique afin de sauvegarder les vautours et d’autres espèces», a recommandé la Dre Gagné.
Cette étude éclaire l’urgent besoin de lutter contre la pollution plastique et ses retombées considérables sur la faune sauvage ainsi que les populations humaines. Au fur et à mesure que les niveaux d’ingestion de plastique par les animaux deviennent de plus en plus perceptibles, il est nécessaire de mener des recherches plus approfondies afin de saisir l’omniprésence de ses répercussions sur les écosystèmes ainsi que la santé publique. Les conclusions du travail de recherche soulignent l’importance de minimiser la pollution plastique et d’élaborer des stratégies de gestion des déchets plus pérennes, notamment dans les zones urbaines densément peuplées.
Impact des déchets plastiques sur la faune globale
La pollution plastique s’est métamorphosée en une crise environnementale planétaire, avec une profonde influence sur la faune sauvage à l’échelle mondiale. La production, l’utilisation et l’élimination inappropriée de produits en plastique ont engendré une contamination à grande échelle des habitats terrestres et aquatiques, affectant une pléthore d’espèces de divers moyens:
- Emmêlement : les animaux, surtout les espèces marines, peuvent se retrouver coincés dans des débris plastiques comme des filets de pêche abandonnés, des sacs en plastique et des matériaux d’emballage. Ce phénomène peut provoquer des blessures, entraver le mouvement et même causer la mort par asphyxie, noyade ou impossibilité de fuir des prédateurs.
- Ingestion : De nombreux animaux confondent le plastique avec de la nourriture et peuvent l’ingérer, causant ainsi des problèmes de santé graves. Le plastique ingéré peut entraîner des obstructions dans le système digestif, des lésions internes, une malnutrition étendue voire même une famine, du fait que le plastique occupe de la place dans l’estomac, donnant ainsi une sensation fallacieuse de satiété.
- Contact avec des substances toxiques: les plastiques peuvent contenir des composés chimiques dangereux qui se déversent lentement dans l’environnement avec le temps.En outre, il est bon de mentionner que la plasticité de ces matériaux peut leur conférer le rôle de véritables éponges, détenant ainsi la capacité d’absorber les polluants environnementaux néfastes qui sont présents aux alentours. Dès lors que les animaux les ingèrent, ces toxines s’accumulent inexorablement dans leurs tissus et engendrent toute une kyrielle de problèmes de santé. Ces derniers peuvent comprendre les freins à la reproduction, les lésions organiques, voire même des perturbations hormonales, pour ne citer que ces tourments.
- Une destruction de l’habitat est également à la clé de cette équation sinistre: l’accumulation de débris plastiques dans les écosystèmes peut conduire à l’altération et à la détérioration des habitats. Dans une telle situation, le comportement instinctif de la faune peut en ressortir avec des transformations négatives flagrantes. Comme un exemple révélateur, il faut mentionner que les microplastiques qui peuplent les fonds océaniques peuvent altérer drastiquement la composition des communautés planctoniques. Une telle bévue écologique agit comme un perturbateur direct du réseau alimentaire, touchant par ricochet les organismes de taille plus imposante qui comptent sur ces minuscules êtres pour leur survie.
- La menace suspendue sur la biodiversité est aussi palpable. La pollution plastique a des répercussions sur une pléthore d’espèces, allant des organismes quasiment invisibles à l’œil nu jusqu’aux grands mammifères. Tandis que les plastiques s’immiscent de plus en plus au sein de la chaîne alimentaire, ils peuvent contribuer activement au flétrissement des espèces vulnérables et dérégler ces équilibres écologiques subtils qui émaillent notre monde naturel.
- Il y a également lieu de noter les potentiels impacts génétiques. D’après des recherches récentes, la pollution plastique pourrait également engendrer des conséquences génétiques inédites sur la faune. L’exposition à ces produits chimiques, qui sont les descendants directs du plastique, a été reliée à des mutations génétiques et à des changements épigénétiques. Ces modifications ont le risque de compromettre la santé, le comportement et même le succès reproductif des animaux exposés, ainsi que de leur descendance.
Combattre la pollution plastique et mitiger ses effets sur la faune sauvage requiert une stratégie holistique. Cette dernière doit inévitablement prendre en compte la réduction de la production et de la consommation de plastique, le perfectionnement des pratiques de gestion des déchets, l’encouragement du recyclage, la promotion de solutions réutilisables en remplacement du plastique, ainsi que la sensibilisation du grand public sur les effets délétères du plastique sur l’environnement et ses occupants.